9mars 2021

L’arrêté du maire de la commune de La Montagne qui restreint les modalités d’utilisation des pesticides sur un nouveau fondement n’a pas été suspendu par le juge des référés du Tribunal administratif de Nantes.

Tribunal administratif de Nantes, Ordonnance, 8 mars 2021, n° 2102294

Tandis que le 31 décembre 2020, un arrêt du Conseil d’État portait un coup d’arrêt aux tentatives de nombreux maires pour règlementer l’usage des produits phytosanitaires sur leur territoire, le 11 janvier 2021, le maire de la commune de La Montagne, en Loire-Atlantique, adoptait un nouvel arrêté en la matière reposant un fondement inédit : les pouvoirs de police municipaux en matière de déchets et de prévention des troubles du voisinage.

Selon l’article 3 de cet arrêté : « Tout rejet de produits phytopharmaceutiques hors de la propriété à laquelle ils sont destinés constitue un dépôt de déchet et est interdit ».

Son article 4 précise que la méconnaissance de cette interdiction constitue une infraction poursuivie conformément aux lois en vigueur et notamment l’article R. 635-8 du code pénal.

C’est précisément l’article 3 de cet arrêté qui, sans surprise, a fait l’objet d’un déféré préfectoral assorti d’une demande de suspension.

Le préfet estimait notamment que les dispositions de cet article sont de nature à méconnaitre l’exercice de plusieurs libertés publiques ou individuelle à savoir la liberté du commerce et de l’industrie, le droit de propriété et les principes régissant la matière répressive.

Le juge des référés, constatant que l’activité agricole sur la commune de La Montagne est presque inexistante, conclut que l’arrêté n’est pas de nature à porter atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie.

Par ailleurs, l’usage des produits phytosanitaires de synthèse par les particuliers étant interdit depuis le 1er janvier 2019, le juge des référés considère que l’arrêté litigieux ne porte pas davantage atteinte au droit des utilisateurs privés d’utiliser les produits visés.

Enfin, en ce qui concerne les atteintes aux principes régissant la matière répressive, le Tribunal administratif estime que les amendes évoquées par l’arrêté correspondent à un mécanisme prévu par la loi et mis en œuvre par le maire en sa qualité d’officier de police judiciaire.

Pour l’ensemble de ces motifs, la juridiction relève que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas susceptibles de revêtir un degré de gravité justifiant le recours à la procédure de suspension et rejette la requête ainsi présentée.

In fine, compte tenu des particularités de la commune de La Montagne, de très petite taille et presque sans aucun espace agricole, nous ne pouvons pas encore considérer que cette décision marque un précédent en matière de règlementation des produits phytosanitaires par le biais de la police des déchets.

Dès lors que de nombreuses communes ont emboité le pas de La Montagne, les diverses appréciation in concreto des juges administratifs apporteront certainement un vaste paysage de décisions juridictionnelles prenant des positions hétérogènes.

Certainement qu’à l’instar de l’intervention des maires dans la règlementation des produits phytopharmaceutiques, le Conseil d’État ou bien le pouvoir règlementaire interviendront dans un avenir proche pour cadrer ce nouveau débat juridique.

Cabinet Coudray Publié le 09/03/2021 dans # Veille juridique