26janvier 2021

La Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une QPC relative aux dispositions de l’article L. 145-14 du Code de commerce en ce qu’elles ne prévoient pas de plafonnement de l’indemnité d’éviction susceptible d’être versée par le bailleur en cas de non renouvellement du bail commercial.

Civ. 3e, QPC, 10 décembre 2020, FS-P+I, n° 20-40.059

L’article L. 145-14 du Code de commerce permet aux propriétaires de murs commerciaux de refuser le renouvellement d’un bail commercial, moyennant le paiement d’une indemnité d’éviction au profit du locataire, égale au préjudice causé par ce défaut de renouvellement.

Le montant de l’indemnité d’éviction pouvant être allouée au locataire doit prendre en compte

« la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre » (Article L. 145-14 al.2 du Code de commerce).

En l’absence d’offre d’indemnité de la part du bailleur, ou à défaut d’accord amiable sur le montant de celle-ci, le juge judiciaire, exclusivement compétent en la matière, peut être amené à se prononcer sur la fixation du montant de l’indemnité d’éviction (Article R. 145-23 du Code de commerce). Cette action en fixation de l’indemnité d’éviction se prescrit par deux ans après la date d’effet du congé d’un bailleur avec refus de renouvellement.

A l’occasion d’un litige porté devant Tribunal Judiciaire de Paris, un bailleur a contesté la conformité de l’article L. 145-14 du Code de commerce au bloc de constitutionnalité. Le Tribunal a transmis la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation.

Par un arrêt du 10 décembre 2020, la Haute Juridiction a jugé la question « sérieuse », précisant que l’article L. 145-14 précité ne prévoyant aucun plafond à l’indemnité d’éviction pouvant être allouée au locataire. La Cour note en particulier que le montant de l’indemnité d’éviction est susceptible de dépasser la valeur vénale des murs et de ce fait serait susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété du bailleur tel que garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.

Si le Conseil constitutionnel considérait l’article L. 145-14 du Code de commerce contraire au bloc de constitutionnalité, il resterait encore au législateur à trouver un équilibre entre les droits du bailleur et celui du preneur.

Cabinet Coudray Publié le 26/01/2021 dans # Veille juridique