16juin 2022

À partir du 1er janvier 2023, les gestionnaires publics, qu’ils soient ordonnateurs ou comptables, seront soumis au même régime de juridictionnel de responsabilité financière.

L’article 168 de la loi de finances pour 2022 avait autorisé le gouvernement à modifier le régime juridictionnel de responsabilité financière des gestionnaires publics afin d’unifier les règles applicables aux ordonnateurs et aux comptables et moderniser ce régime dont les limites, notamment s’agissant des comptables, étaient connues de longue date.

C’est chose faite avec l’ordonnance n° 2022-408 du 23 mars 2022 relative au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics, qui opère une modification profonde du code des juridictions financières, en vigueur à partir du 1er janvier 2023.

Si la distinction cardinale des finances publiques entre ordonnateurs et comptables est maintenue – ce que traduit la consécration de la gestion de fait comme infraction (CJF, art. L. 131-15) – tous relèveront désormais d’un seul régime de responsabilité en tant que « gestionnaires publics » (CJF, art. L. 111-1).

En cette qualité, ils seront justiciables d’une même juridiction, la chambre du contentieux de la Cour des comptes, composée de magistrats du Palais Cambon et des chambres régionales et territoriales des comptes. Disparaît ainsi la Cour de discipline budgétaire et financière, qui jugeait les seuls ordonnateurs. Progrès dans les droits des justiciables, une juridiction d’appel est créée, la Cour d’appel financière, le juge de cassation restant le Conseil d’État.

Changement le plus notable, il est mis fin à la responsabilité personnelle pécuniaire des comptables, qui commençait au premier euro et pouvait aboutir à leur mise en débet à hauteur des montants irréguliers, leur imposant un coûteux système d’assurance.

Il n’y aura désormais plus qu’une seule série d’infractions prévues tant pour les ordonnateurs que les comptables (CJF, art. L. 131-9 à L. 131-15), et une seule série de sanctions (CJF, art. L. 131-16 à L. 131-20).

S’agissant des infractions, on relèvera l’exigence d’une « faute grave ayant causé un préjudice financier significatif » en cas d’infraction aux règles relatives à l’exécution des recettes et des dépenses ou à la gestion des biens publics (CJF, art. L. 131-19), nouveauté qui traduit bien la volonté du législateur de concentrer la répression sur les gestionnaires publics les plus défaillants.

À cet égard, nous ne partageons pas l’inquiétude manifestée par certains ordonnateurs de voir désormais leur responsabilité engagée du fait de leur rôle, parfois modeste, dans la gestion de fonds publics, outre que cette émotion reflète souvent la méconnaissance d’avoir été jusqu’alors justiciable de la CDBF.

Autre signe de cette volonté de réserver la responsabilité juridictionnelle aux cas les plus blâmables, l’ajout à l’infraction d’octroi d’un avantage injustifié (CJF, art. L. 131-12) d’une condition tenant à l’existence d’un « intérêt personnel direct ou indirect ».

S’agissant des sanctions, l’unification se traduit par une seule modalité, l’amende, dont le montant ne peut excéder six mois de rémunération annuelle (CJF, art. L. 131-17), contre un voire deux ans pour les ordonnateurs dans le régime actuel (CJF, art. L. 313-1 et s.).

Cabinet Coudray
Ludovic DUFOUR
Publié le 16/06/2022 dans # Veille juridique