30août 2022

Par une décision du 1er juillet 2022, le Conseil d’État a précisé quels éléments devaient être pris en compte dans la comparaison entre l’ancienne et la nouvelle rémunération d’un salarié transféré à une personne publique dans le cadre d’une reprise d’activité (article L. 1224-3 code du travail)

Lorsqu’une personne publique (collectivité territoriale, établissement de santé, établissement médico-social, etc.) reprend l’activité d’une personne privée (association, société, etc.), il lui appartient de proposer aux salariés de cette dernière des contrats de droit public reprenant les clauses substantielles de leurs contrats de travail. Parmi lesdites clauses substantielles figure la rémunération.

Cette obligation découle des dispositions de l’article L. 1224-3 du code du travail :

« Lorsque l’activité d’une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d’un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires.

Sauf disposition légale ou conditions générales de rémunération et d’emploi des agents non titulaires de la personne publique contraires, le contrat qu’elle propose reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération. (…) »

La détermination par la personne publique de la rémunération à proposer aux salariés est une opération qui peut s’avérer délicate étant donné que les contractuels de droit public sont la plupart du temps rémunérés sur le modèle des fonctionnaires, c’est-à-dire par une rémunération de base à laquelle s’ajoutent des primes et indemnités. De telles modalités de rémunération peuvent s’avérer très différentes de celles ayant cours dans le privé, où le versement d’une rémunération forfaitaire est bien plus courant, et où les primes pouvant exister ne correspondent pas à celles du secteur public.

Par un arrêt n° 444792 du 1er juillet 2022, le Conseil d’État est venu préciser les modalités de comparaison entre la rémunération de droit public devant être proposée aux salariés dans le cadre d’une reprise d’activité et leur rémunération antérieure dans le privé.

Il a jugé que les deux rémunérations à comparer s’entendent de la rémunération brute de base et du montant brut de l’ensemble des primes et indemnités fixes et variables liées à l’exercice normal des fonctions :

« (…) Pour l’application de ces dispositions, la rémunération antérieure et la rémunération proposée doivent être comparées en prenant en considération, pour leurs montants bruts, les salaires ainsi que les primes éventuellement accordées à l’agent et liées à l’exercice normal des fonctions, dans le cadre de son ancien comme de son nouveau contrat.

  1. Pour l’appréciation du montant de la rémunération résultant de l’ancien contrat de droit privé, le montant brut des primes accordées à l’agent et liées à l’exercice normal des fonctions comprend toutes les primes et indemnités qui, au moment de la reprise d’activité par une personne publique, lui étaient versées par son employeur à échéances régulières, y compris celles qui, à l’instar des primes d’ancienneté ou de déroulement de carrière, ne rémunèrent pas directement la prestation de travail. Pour l’appréciation du montant de la rémunération résultant du nouveau contrat de droit public, le montant brut des primes accordées à l’agent et liées à l’exercice normal des fonctions comprend toutes les primes et indemnités contractuellement prévues, qu’il s’agisse des primes fixes, comme l’indemnité de résidence, ou des primes variables que l’agent est susceptible de percevoir. S’agissant en particulier des primes variables, telles que l’indemnité d’exercice de missions des préfectures et l’indemnité d’administration et de technicité, elles doivent ainsi être prises en compte, eu égard aux modalités de leur détermination, pour leur montant de référence ou tout autre montant servant de base aux modulations individuelles, tel que ce montant est arrêté par la collectivité concernée dans le cadre du régime qui les détermine. (…) »

Le Conseil d’État est venu consacrer une conception globale de la notion de rémunération, puisqu’il n’y a pas lieu selon lui d’exclure certaines primes et indemnités de la comparaison entre l’ancienne rémunération et la nouvelle au motif que leur montant est susceptible, par exemple, de faire l’objet de modulations individuelles ou de varier dans le temps.

Parallèlement, cette décision garantit aux agents que la rémunération qu’ils percevaient dans le privé et qui doit être prise en compte par la personne publique au moment de la reprise d’activité comprend toutes les primes et indemnités qu’ils percevaient à échéances régulières, et non simplement le salaire de base.

Ainsi, la solution dégagée par le Conseil d’État accorde des garanties aux agents tout en venant éclairer et simplifier le travail des employeurs publics au moment de la proposition des contrats de droit public dans le cadre de la reprise d’activité.

Cabinet Coudray
Sébastien DUGUÉ
Publié le 30/08/2022 dans # Veille juridique