1septembre 2022

Par une Ordonnance N° 2004459, en, date du 12 mai 2022, le Juge des référés du Tribunal administratif de RENNES, statuant dans le cadre d’un référé provision, a mis un coup d’arrêt à la reconnaissance d’un décompte général et définitif devenu prétendument tacite au profit du titulaire.

Pour rappel, en synthèse, en application du CCAG-Travaux dans sa version 2014  :

– Le titulaire transmet son projet de décompte final au maître d’œuvre et au maître d’ouvrage ;

– Le maître d’ouvrage dispose d’un délai de 30 jours pour notifier le projet décompte général ;

– Passé ce délai, le titulaire du marché peut adresser au maître d’ouvrage et au maître d’œuvre son propre projet de décompte général ;

– En l’absence de notification par le maître d’ouvrage d’un décompte général dans les 10 jours suivant la notification du projet de décompte général du titulaire, ce dernier devient tacitement définitif.

En l’espèce, le titulaire d’un marché de travaux se prévalait d’un décompte général et définitif tacite ayant revêtu ce caractère au terme de l’absence de réponse du maître d’ouvrage à ses projets de décompte final et de décompte général.

Or, le Juge du référé provision ne fait pas droit à la demande du titulaire au motif que l’absence de mémoire en réclamation avant saisine du Juge administratif est un motif de contestation sérieuse de la créance :

 

  1. En premier lieu, la fin de non-recevoir selon laquelle, eu égard aux règles contenues à l’article 50.1.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux) auquel se référait le contrat litigieux, la société ACR ne pouvait, comme elle l’a fait, saisir le tribunal administratif sans avoir, au préalable, adressé à Redon Agglomération Bretagne Sud une réclamation préalable se prévalant du droit à paiement résultant, selon elle, de l’intangibilité du décompte général et définitif né tacitement du silence conservé pendant plus de dix jours par l’administration sur son propre décompte, présente le caractère d’une contestation sérieuse. Ainsi, compte tenu de cette irrecevabilité contractuelle opposée en défense, l’obligation dont se prévaut la société ACR ne peut être regardée comme non sérieusement contestable.

Par cette décision, le tribunal administratif relaye ainsi une jurisprudence déjà développée par d’autres Cour administratives d’appel (voir notamment : CAA de MARSEILLE, 10 juin 2020, req. n° 20MA00033) considérant que le mémoire en réclamation, prévu par l’article 50.1.1 du CCAG Travaux, en cas de différend entre le titulaire et le représentant du pouvoir adjudicateur est un préalable nécessaire à la saisine du Tribunal administratif même en cas de décompte général et définitif tacite.

Dès lors, il appartiendra au titulaire, s’il considère que son projet de décompte général est devenu définitif du fait de l’inertie de l’acheteur, de présenter à la personne publique une demande de paiement avant toute saisine du Juge sous la forme d’un mémoire en réclamation.

Toutefois, si l’aspect procédural permet de contrecarrer, à un instant « t », un décompte général et définitif tacite, il n’en demeure pas moins que le titulaire pourra, dans un second temps, régulariser sa demande de paiement en présentant un mémoire en réclamation à l’acheteur puis obtenir du Tribunal le paiement du décompte général et définitif obtenu tacitement.

Cette hypothèse ne sera malgré tout possible que dans le cas d’une procédure régulière suivie par le titulaire dans la transmission de son projet de décompte final puis de son projet de décompte général, s’agissant notamment des délais de notification, des personnes notifiées (maître d’ouvrage, maître d’œuvre), ou encore des éléments contenus dans ces projets …

En définitif, si un titulaire peut se prévaloir d’un décompte général et définitif tacite, la route est encore longue avant que le juge administratif n’acte de la régularité de la procédure et du nécessaire paiement de la somme revendiquée par la personne publique.

Les Collectivités disposent donc de moyens procéduraux sérieux afin de faire échec à un prétendu décompte général et définitif tacite.

Cabinet Coudray
Guillaume GEFFROY
Publié le 01/09/2022 dans # Veille juridique