7janvier 2025

 

 

 

Par une décision du 18 décembre 2024 (n°22BX01625), la CAA de Bordeaux illustre le contrôle exercé par le juge administratif en matière de sélection préalable des candidats à l’occupation du domaine public. La Cour a rappelé l’importance du respect des principes d’égalité de traitement et de transparence, tout en reconnaissant la liberté de l’administration dans la détermination de la méthode de notation des offres.

Dans l’affaire en cause, la société en nom collectif (SNC) Pinel avait contesté la validité des conventions conclues entre le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres et deux sociétés, la SAS Karibuni et la SARL P2D2, pour l’exploitation d’aires de restauration sur l’îlet Pinel. Le tribunal administratif de Saint-Martin avait prononcé la résiliation de ces conventions, décision contre laquelle la SAS Karibuni et le Conservatoire du littoral ont interjeté appel.

La Cour administrative d’appel a d’abord examiné la recevabilité de l’appel du Conservatoire du littoral. La SNC Pinel soutenait que les mémoires d’appel du Conservatoire étaient tardifs et donc irrecevables. La Cour a confirmé cette position, jugeant que les mémoires en défense du Conservatoire, enregistrés après l’expiration du délai de recours contentieux, étaient effectivement tardifs et irrecevables. Toutefois, cette irrecevabilité n’a pas empêché la Cour de se prononcer sur le fond de l’affaire, en examinant les moyens soulevés par la SAS Karibuni.

L’un des points centraux de l’arrêt concerne la méthode de notation des offres. Le tribunal administratif avait jugé que le Conservatoire du littoral n’avait pas respecté la procédure de sélection qu’il s’était lui-même imposée, en méconnaissance des principes d’égalité de traitement et de transparence. La Cour administrative d’appel a infirmé cette analyse, considérant que la méthode de notation retenue par le Conservatoire avait été respectée. La Cour a souligné que les éléments d’appréciation des critères de sélection ne constituaient pas des sous-critères à part entière et que le Conservatoire avait pu attribuer des points par critères de manière globale. La Cour a conclu que le Conservatoire avait correctement appliqué sa méthode de notation, et que les premiers juges avaient à tort estimé le contraire.

Un autre point de contestation portait sur la nature de la convention, la SNC Pinel soutenant qu’il s’agissait d’une concession de service public ou d’un contrat de prestation de service, nécessitant des obligations de publicité et de mise en concurrence spécifiques. La Cour a rejeté cette qualification, considérant que la convention avait pour objet principal l’occupation du domaine public maritime moyennant une redevance, sans confier aux cocontractants la gestion d’un service public. La Cour a donc conclu que les obligations de publicité et de mise en concurrence prévues pour les contrats de concession ou de prestation de service ne s’appliquaient pas.

Enfin, la Cour a examiné le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation dans le choix de l’attributaire de la convention. La Cour a analysé en détail les critères de sélection des offres et a conclu que le Conservatoire n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en retenant la candidature de la SAS Karibuni. La Cour a relevé que l’offre de la SAS Karibuni était supérieure sur les critères techniques et d’expérience en milieu isolé, et que les solutions proposées par la SNC Pinel présentaient des risques et des insuffisances.

En confirmant la validité de la convention d’occupation du domaine public, la Cour a également souligné la nécessité pour les candidats évincés de démontrer un lien direct entre les irrégularités alléguées et leur éviction.

CAA Bordeaux, 18 décembre 2024, n° 22BX01625

Cabinet Coudray
Jean-Éric CORILLION
Publié le 07/01/2025 dans # Veille juridique