28décembre 2018

Légalité de la délibération constatant l’état d’abandon manifeste d’une parcelle et poursuivant son expropriation en dépit de menus travaux réalisés par les propriétaires

Par un récent arrêt du 13 septembre 2018, la cour administrative d’appel de Douai précise que la réalisation par les propriétaires de menus travaux sur le bien objet de la procédure d’état d’abandon manifeste, à l’issue du délai légal de six mois pour faire cesser cet état, ne permet pas de constater qu’ils auraient manifesté leur intention de mettre sérieusement fin à l’état d’abandon de la parcelle, et n’est pas de nature à entacher d’illégalité la délibération par laquelle le conseil municipal a déclaré le bien en état d’abandon manifeste et a poursuivi la procédure d’expropriation au profit de la commune (CAA Douai, 13 septembre 2018, n°16DA00830).

Les faits sur lesquels s’est prononcée la cour administrative d’appel de Douai sont les suivants.

Une SCI était propriétaire d’un terrain à Dunkerque, laissé à l’abandon. Le maire de la commune, autorisé par le conseil municipal, et ce conformément aux anciennes dispositions en vigueur (article L. 2243-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) avant sa modification par la loi n°2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux), a engagé une procédure de déclaration d’état d’abandon manifeste de la parcelle par arrêté du 26 mars 2009.

Un procès-verbal provisoire a été dressé le 23 avril 2011 précisant la nature des travaux indispensables pour faire cesser l’état d’abandon de la parcelle : le nettoyage et le pré-verdissement du terrain ainsi que la pose d’une clôture adaptée permettant de sécuriser les lieux.

Lesdits travaux devaient être entrepris dans un délai de six mois à compter des formalités de publication et de notification de ce procès-verbal, conformément aux dispositions de l’article L. 2243-3 du CGCT dans sa rédaction alors applicable :

« A l’issue d’un délai de six mois à compter de l’exécution des mesures de publicité et des notifications prévues à l’article L. 2243-2, le maire constate par un procès-verbal définitif l’état d’abandon manifeste de la parcelle ; ce procès-verbal est tenu à la disposition du public. Le maire saisit le conseil municipal qui décide s’il y a lieu de déclarer la parcelle en état d’abandon manifeste et d’en poursuivre l’expropriation au profit de la commune, pour une destination qu’il détermine.

La procédure tendant à la déclaration d’état d’abandon manifeste ne peut être poursuivie si, pendant le délai mentionné à l’alinéa précédent, les propriétaires ont mis fin à l’état d’abandon ou ont manifesté leur intention d’y mettre fin soit en commençant des travaux, soit en s’engageant à les réaliser dans un délai fixé en accord avec le maire. (…) »

Pour rappel, ce délai a été réduit à trois mois par l’article 7 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (1).

Au présent cas, ce n’est qu’après expiration dudit délai de six mois que les propriétaires ont entrepris de menus travaux sur leur bien.

C’est ainsi qu’ils ont procédé à la mise en place de barrières oxydées assorties d’un grillage en mauvais état maintenus à l’aide de simples bastaings et à un nettoyage extrêmement sommaire de la parcelle, le terrain restant recouvert de végétation et de mauvaises herbes révélant la présence de divers déchets au sol et de restes de structures bois partiellement démontées et hors d’usage.

Par délibération du 18 mars 2013, le conseil municipal de Dunkerque a malgré cela constaté l’état d’abandon manifeste de la parcelle et décidé d’engager la procédure d’expropriation au profit de la commune en vue de la cession ultérieure du terrain à un bailleur social pour la construction de logements.

La SCI requérante a sollicité auprès du tribunal administratif de Lille l’annulation de la délibération du 18 mars 2013 et de la décision portant rejet de son recours gracieux dirigé contre celle-ci.

Ayant été déboutée de l’ensemble de ses demandes par les premiers juges, elle a interjeté appel auprès de la cour administrative d’appel de Douai.

Cette dernière a considéré que ces interventions très partielles, effectuées de surcroît après expiration du délai légal de six mois pour faire cesser l’état d’abandon manifeste, et rapidement interrompues, ne permettaient pas de considérer que la SCI aurait manifesté son intention de mettre fin à l’état d’abandon de la parcelle en commençant des travaux.

Ce faisant, elle a jugé qu’en décidant de déclarer en état d’abandon manifeste la parcelle et de poursuivre son expropriation au profit de la commune, le conseil municipal de Dunkerque n’avait pas méconnu les dispositions de l’article L. 2243-3 du CGCT.

Le jugement rendu par le tribunal administratif de Lille a été confirmé et la requête de la SCI rejetée.

 

 

 

Cabinet Coudray Publié le 28/12/2018 dans # Publications