2juin 2020

Les collectivités peuvent demander une prise de position formelle au représentant de l’État, préalablement à l’édiction de leur décision, lorsqu’une norme législative ou règlementaire est sujette à interprétation.

Dans le cadre de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, le législateur a entendu développer la pratique des prises de position formelle de l’administration.

Ce dispositif n’est donc plus cantonné à la matière fiscale, ni aux administrés. Il tend à se développer dans des domaines variés (code de l’environnement, code de l’urbanisme, code du patrimoine, code de l’éducation…) et s’ouvre aux collectivités.

Ainsi, dans le cadre de la « libre administration des collectivités territoriales », l’article L. 1116-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), créé par l’article 74 de la loi Engagement et proximité, instaure le mécanisme du rescrit administratif au bénéfice des collectivités territoriales :

« Avant d’adopter un acte susceptible d’être déféré au tribunal administratif, les collectivités territoriales ou leurs groupements ainsi que leurs établissements publics peuvent saisir le représentant de l’Etat chargé de contrôler la légalité de leurs actes d’une demande de prise de position formelle relative à la mise en œuvre d’une disposition législative ou réglementaire régissant l’exercice de leurs compétences ou les prérogatives dévolues à leur exécutif. (…) »

Par un décret d’application n° 2020-634 du 25 mai 2020 publié au Journal officiel le 27 mai 2020, les modalités de mise en œuvre du rescrit préfectoral ont été précisées.

A retenir :

  • D’abord, la demande doit être accompagnée du projet d’acte et présenter de manière « claire et précise » la ou les questions de droit portant sur l’interprétation d’une disposition législative ou règlementaire directement liée au projet d’acte (article R. 1116-2 du CGCT).

La demande doit notamment présenter l’ensemble des circonstances de fait et de droit fondant le projet d’acte et tout type d’information pouvant permettre à l’administration de se prononcer. Cette dernière dispose d’ailleurs du pouvoir de solliciter des éléments complémentaires à la collectivité demanderesse.

Sur le plan pratique, la demande de prise de position formelle doit être transmise par tout moyen permettant d’apporter la preuve de sa réception (article R. 1116-1 du CGCT).

La réponse du représentant de l’État sera quant à elle transmise selon les mêmes modalités (article R. 1116-4 du CGCT).

  • Ensuite, il convient de relever que le représentant de l’État n’est pas soumis à une obligation de réponse. L’article L. 1116-1 du CGCT déroge au principe du silence valant acceptation.

Le décret précise que le silence gardé par le représentant de l’État pendant trois mois vaut absence de prise de position formelle et court à compter de la réception de la demande par la préfecture (article R. 1116-3 du CGCT).

Le représentant de l’État est alors réputé s’être abstenu de prendre une position formelle.

Si ce délai ne préfigure pas systématiquement un délai d’attente de près de trois mois, il n’en demeure pas moins que ce temps de réponse relativement long fait courir le risque que l’acte soit pris avant la prise de position de la préfecture.

Dans l’hypothèse où la préfecture prendrait position après l’adoption de l’acte, le guide d’application de la loi engagement et proximité, prévoit que, sauf changement de circonstance, le préfet ne pourra pas déférer l’acte au tribunal administratif s’il est conforme à une position formellement exprimée.

Ce faisant, quelle que soit la temporalité de la prise de position, cette dernière est opposable au préfet au stade du contrôle de légalité de l’acte.

  • Enfin, lors de la transmission de l’acte définitif au représentant de l’État, dans le cadre du contrôle de légalité, la collectivité demanderesse doit joindre à l’acte transmis la prise de position formelle.

Si ce dispositif présente l’avantage de sécuriser la décision définitive, il peut également retarder inutilement son adoption ou bien impacter sensiblement son contenu.

Cabinet Coudray Publié le 02/06/2020 dans # Veille juridique