18février 2025

 

 

 

Par une décision n°24NT00896 rendue le 7 février 2025, la cour administrative d’appel de Nantes est venue clarifier la portée des obligations pesant sur les acheteurs dans le cadre des régimes dérogatoires aux règles de la commande publique des marchés dispensés de publicité et de mise en concurrence.

Dans cette affaire, trois conseillers municipaux demandaient au juge administratif l’annulation d’un marché public conclu par une commune pour la réalisation de travaux de voirie. Les requérants soutenaient que le contrat avait été conclu en méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence, que la commune avait violé le principe de transparence et d’égalité de traitement des candidats, et qu’elle n’avait pas détecté les offres anormalement basses.

Débouté en première instance, les trois élus ont fait appel du jugement rendu par le tribunal administratif de Caen.

Saisi des mêmes moyens, la Cour a :

  • Dans un premier temps, constaté que la commune avait agi dans le cadre des dispositions dérogatoires de l’article 142 de la loi du 7 décembre 2020 (dite loi ASAP), qui permettaient, jusqu’au 31 décembre 2022 (et désormais jusqu’au 31 décembre 2025), de conclure un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence pour des besoins inférieurs à 100 000 euros HT ;
  • Dans un second temps, considéré que la sollicitation par le maire de devis de la part de trois entreprises pour la réalisation des travaux objet du marché, soumis au conseil municipal pour n’en retenir qu’un seul, n’implique pas que la commune aurait entendu se placer dans le cadre d’une procédure adaptée impliquant une mise en concurrence ;

En effet, la consultation de différents devis avait uniquement pour but de respecter les critères posés par l’article 142 de la loi du 7 décembre 2020 tirés du choix d’une offre pertinente, en faisant une bonne utilisation des deniers publics ;

À ce titre, elle n’était pas soumise, notamment, à l’obligation de communiquer aux entreprises sollicitées des critères de choix des offres ;

Tirant les conclusions de son raisonnement, le juge d’appel a écarté le moyen tiré de ce que le contrat en cause aurait été conclu en méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence applicables à la procédure adaptée à laquelle la commune se serait spontanément soumise.

La cour a ensuite écarté un moyen tiré de l’absence de mise en œuvre par la commune de la procédure de détection des offres anormalement basses alors que les requérants ne développent aucun argument dénonçant l’absence de pertinence de l’offre retenue, la mauvaise utilisation des deniers publics ou l’interdiction de contracter systématiquement avec un même opérateur économique, seuls critères posés par l’article 142 de la loi du 7 décembre 2020.

Dans ce cadre, le recours des trois élus a été rejeté.

En conclusion, cette décision illustre l’application des dispositions dérogatoires permettant aux acheteurs publics de conclure des marchés de travaux sans publicité ni mise en concurrence pour des montants inférieurs au seuil de 100 000 euros HT.

Elle précise particulièrement que la sollicitation de plusieurs devis pour un marché de travaux inférieur à 100 000 euros HT, relevant du dispositif dérogatoire de l’article 142 de la loi ASAP, ne vaut pas engagement à respecter les règles d’une procédure adaptée.

En effet, une telle consultation s’inscrit uniquement dans le respect des obligations minimales prévues par ce texte : choix d’une offre pertinente, bonne utilisation des deniers publics et absence de contractualisation systématique avec le même opérateur.

Cabinet Coudray
Guillaume EMÉLIEN
Publié le 18/02/2025 dans # Veille juridique