20juin 2022

Par une décision du 1er juin 2022, le Conseil d’État a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’obligation faite aux collectivités territoriales de mettre en place un temps de travail annuel de 1607 heures pour leurs agents.

L’article 47 de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 avait laissé jusqu’au 1er janvier 2022 aux collectivités territoriales pour qu’elles appliquent effectivement un temps de travail annuel de 1607 heures à leurs agents, soit 35 heures de travail hebdomadaire.

Cette disposition législative visait à aligner le temps de travail dans la fonction publique territoriale sur celui dans la fonction publique d’État, en mettant un terme aux dérogations historiques ne reposant sur aucun texte, comme par exemple les jours du maire, les jours d’ancienneté, les congés de pré-retraite, etc.

La seule possibilité laissée aux collectivités territoriales par la loi du 6 août 2019 pour déroger au temps de travail annuel de 1607 heures était de mettre en place des régimes spécifiques justifiés par l’existence de sujétions particulières pesant sur certains services ou cadres d’emplois. Il s’agissait par exemple de pouvoir prendre en compte la pénibilité de certaines fonctions pour accorder davantage de jours de repos aux agents les exerçant.

L’application de cette réforme a donné lieu à de nombreux litiges, souvent à l’initiative des Préfets dans le cadre de leur contrôle de légalité. Ceux-ci se sont en effet montrés vigilants à ce qu’il soit fait une application stricte de la loi du 6 août 2019 par les collectivités territoriales.

À l’occasion d’un de ces litiges, opposant plusieurs communes du Val-de-Marne à la préfète de ce département, une question prioritaire de constitutionnalité a été soulevée devant le juge des référés du tribunal administratif de Melun.

Les communes soutiennent que les dispositions de l’article 47 de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 sont contraires à la Constitution en ce qu’elles portent à la libre administration des collectivités territoriales et à la liberté contractuelle une atteinte disproportionnée non justifiée par un motif d’intérêt général.

Le juge des référés du tribunal administratif de Melun a transmis cette question au Conseil d’État.

Ce dernier, par décision n° 462193, 462194, 462195 et 462196 du 1er juin 2022, a considéré que les conditions étaient remplies pour que cette question prioritaire de constitutionnalité soit transmise au Conseil constitutionnel, en particulier car il s’agit d’une question nouvelle :

« 5. Les dispositions de l’article 47 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique sont applicables aux litiges au sens et pour l’application des dispositions de l’article 23-4 de l’ordonnance du 7 novembre 1958. Elles n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Le moyen tiré de ce qu’elles portent à la libre administration des collectivités territoriales et à la liberté contractuelle une atteinte disproportionnée que ne justifierait aucun motif d’intérêt général soulève une question qui peut être regardée comme nouvelle au sens de l’article 23-4 de l’ordonnance du 7 novembre 1958. Par suite, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée. »

Le Conseil constitutionnel dispose d’un délai de trois mois à compter de la transmission par le Conseil d’État pour statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité.

Il ne fait aucun doute que sa décision est très attendue par les collectivités territoriales et leurs agents tant le sujet des 1607 heures a pu être discuté ces dernières années.

Cabinet Coudray
Sébastien DUGUÉ
Publié le 20/06/2022 dans # Veille juridique