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ACTUALITE LEGISLATIVE
- Le décret n° 2018-954 du 5 novembre 2018, publié que Journal Officiel du 6 novembre 2018, reporte l’obligation pour les administrations de pouvoir recevoir les demandes d’autorisations d’urbanisme par voie dématérialisée au 31 décembre 2021. Pour rappel cette obligation devait être effective à compter du 7 novembre 2018, en application de l’annexe 2 du décret du 4 novembre 2016.
On rappellera que le Conseil constitutionnel, s’il a censuré 19 cavaliers législatifs, a jugé conforme à la constitution, les nouvelles règles de constructibilité en zones littorales et d’accessibilité des logements (voir notre focus).
- Le décret n°2018-1249 du 26 décembre 2018, publié au Journal Officiel du 28 décembre 2018, donne compétence, à compter de sa date d’entrée en vigueur, à la Cour administrative d’appel de Paris pour statuer en premier et dernier ressort sur l’ensemble des recours (à l’exception de ceux relevant du Conseil d’Etat) formés contre les actes afférents aux opérations d’urbanisme et d’aménagement, aux infrastructures et à la voirie ainsi qu’aux opérations foncières et immobilières nécessaires aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Le décret prévoit également que les tribunaux administratifs, qui auraient été précédemment saisis, au plus tard le jour de la publication du décret, de recours contre des actes portant sur les mêmes objets y statuent en premier et dernier ressort.
DOCTRINE ADMINISTRATIVE
- Interrogé sur la possibilité pour une commune d’engager une action lorsque, en zone agricole, la construction initialement autorisée pour un usage d’habitation d’un salarié de l’exploitation est, dans les faits, affectée à la location touristique, le Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales a répondu que
« lorsque, dans un secteur donné, la destination d’une construction n’est pas autorisée, un procès-verbal d’infraction doit être établi sur le fondement de l’article L. 610-1 du code de l’urbanisme (violation des règles d’urbanisme de fond). Le procès-verbal est ensuite transmis au procureur de la République qui décide de l’opportunité de poursuivre l’auteur des faits devant le tribunal correctionnel. Le tribunal peut alors condamner le contrevenant à une peine d’amende et prononcer des mesures de restitution. Parmi les mesures de restitution qui peuvent être ordonnées en application de l’article L. 480-5 du code de l’urbanisme, figurent notamment la démolition ou la mise en conformité de la construction avec l’autorisation accordée» ( Min. n°07659, JO Sénat, 20 décembre 2018, p. 6598).
ACTUALITE JURISPRUDENTIELLE
Autorisations d’urbanisme
- Dans un arrêt en date du 25 octobre 2018, le Conseil d’État est venu préciser le contrôle du juge sur un dossier de demande de permis de construire dans une zone à risque (en l’espèce, un plan de prévention des risques naturels prévisibles). Ainsi, si le juge doit s’assurer de la production, par le pétitionnaire, d’un document établi par l’architecte du projet ou par un expert attestant qu’une étude a été menée conformément aux exigences de la règlementation et que ses résultats ont été pris en compte au stade de la conception du projet ; il ne lui appartient pas de « porter une appréciation sur le contenu de l’étude et son caractère suffisant au regard des exigences des plans de prévention des risques qui en imposent la réalisation» (CE, 25 octobre 2018, Commune de Montreuil, n°412542, sera mentionné aux Tables).
- Après avoir rappelé le principe dégagé par la jurisprudence Bouc-Bel-Air (CE, 4 mai 2018, Commune de Bouc Bel Air, n°410790, sera mentionné aux Tables), la Cour administrative d’appel a indiqué que « le silence de l’autorité compétente au terme de ce délai d’un mois dans lequel elle doit statuer à nouveau sur la demande [ensuite de la réception du nouvel avis ou de l’admission tacite du recours], vaut permis de construire tacite» (CAA Lyon, 8 novembre 2018, M.C.J., n°16LY02353).
- Par une décision du 26 novembre 2018, qui sera mentionnée aux Tables, le Conseil d’Etat a – de nouveau – assoupli sa jurisprudence Thalamy (CE, 9 juillet 1986, Thalamy, n°51172, rec. 201).
Désormais,
« lorsque le bénéficiaire d’un permis ou d’une décision de non-opposition à déclaration préalable a adressé au maire une déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux réalisés en vertu de cette autorisation, l’autorité compétente ne peut plus en contester la conformité au permis ou à la déclaration si elle ne l’a pas fait dans le délai, suivant les cas, de trois ou de cinq mois ni, dès lors, sauf le cas de fraude, exiger du propriétaire qui envisage de faire de nouveaux travaux sur la construction qu’il présente une demande de permis ou dépose une déclaration portant également sur des éléments de la construction existante, au motif que celle-ci aurait été édifiée sans respecter le permis de construire précédemment obtenu ou la déclaration préalable précédemment déposée » (CE, 26 novembre 2018, M.C., n°411991).
- La notification, dans le délai imparti, de la décision de rejet d’une demande de permis de construire à l’un des co-demandeurs fait obstacle à la formation d’une autorisation tacite, même en l’absence d’information des autres co-demandeurs a considéré la Cour administrative d’appel de Marseille (CAA Marseille, 11 décembre 2018, SELARL Blanc-A., n°17MA04408).
- Par une décision en date du 28 décembre 2018, le Conseil d’État est venu préciser comment apprécier le changement de destination des constructions anciennes, régulièrement édifiées sans permis de construire, et ayant perdu leur usage. Ainsi,
« si l’usage d’une construction résulte en principe de la destination figurant à son permis de construire, lorsqu’une construction, en raison de son ancienneté, a été édifiée sans permis de construire et que son usage initial a depuis longtemps cessé en raison de son abandon, l’administration, saisie d’une demande d’autorisation de construire, ne peut légalement fonder sa décision sur l’usage initial de la construction ; il lui incombe d’examiner si, compte tenu de l’usage qu’impliquent les travaux pour lesquels une autorisation est demandée, celle-ci peut être légalement accordée sur le fondement des règles d’urbanisme applicables» (CE, 28 décembre 2018, M.B., n°408743).
Urbanisme commercial
- Dans un arrêt en date du 14 novembre 2018, qui sera publié au Recueil (CE, 14 novembre 2018, Société MGE Normandie, n°409833), le Conseil d’Etat a défini les actes les actes susceptibles de recours en matière d’aménagement commercial après l’entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2014.
D’abord, pour les permis de construire intervenus avant le 15 février 2015 et ne tenant donc pas lieu d’autorisation d’exploitation commerciale,
« la décision de la Commission nationale d’aménagement commercial intervenue sur un recours dirigé contre une décision de la commission départementale d’aménagement commercial relative à ce projet antérieure au 15 février 2015 est un acte administratif faisant grief, susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ; qu’il en va ainsi aussi bien lorsque la décision de la Commission nationale d’aménagement commercial est intervenue avant le permis de construire que dans le cas où, en raison de la durée d’instruction du recours contre la décision de la commission départementale, elle intervient après celui-ci, y compris, ainsi qu’il résulte des dispositions du V de l’article 4 du décret du 12 février 2015 mentionné ci-dessus, lorsque la décision de la commission nationale est postérieure au 14 février 2015 ».
Ensuite,
« lorsqu’un projet soumis à autorisation d’exploitation commerciale en vertu des dispositions de l’article L. 752-1 du code de commerce doit également faire l’objet d’un permis de construire, ce permis tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale dès lors que la demande de permis a donné lieu à un avis de la commission départementale d’aménagement commercial et que le permis de construire a été délivré après le 14 février 2015 ; que ce permis peut ainsi, sous la seule réserve mentionnée ci-après au point 5, faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale ; qu’il résulte des dispositions de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme que ce recours est ouvert aux personnes mentionnées à l’article L. 752-17 du code de commerce et que seuls sont recevables à l’appui de ce recours les moyens relatifs à la légalité du permis en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale ».
Enfin (c’est « la réserve du point 5 » précitée),
« si, en raison de la situation transitoire créée par l’entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2014, un projet a fait l’objet d’une décision de la Commission nationale d’aménagement commercial avant le 15 février 2015 et d’un permis de construire délivré, au vu de cette décision, après le 14 février 2015, seule la décision de la Commission nationale d’aménagement commercial est susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir en tant qu’acte valant autorisation d’exploitation commerciale ; qu’en effet, l’autorisation d’exploitation commerciale ayant déjà été accordée, le permis de construire ne peut alors, par exception à ce qui a été dit au point 4, faire l’objet d’un recours qu’en tant qu’il vaut autorisation de construire ».
Documents d’urbanisme
- S’il appartient aux auteurs du Plan Local d’Urbanisme (PLU) de veiller au respect du principe de précaution, il ne leur est pas possible d’interdire « l’implantation des antennes de téléphonie mobile à proximité de certains bâtiments en l’absence d’éléments circonstanciés faisant apparaître, en l’état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier une telle exclusion» (CAA Bordeaux, 16 novembre 2018, Commune de Ramonville-Saint-Agne, n°16BX02996).
- Lorsqu’une zone d’aménagement est ouverte secteur par secteur, la nécessité de réaliser une évaluation environnementale de la modification du plan local d’urbanisme ne s’apprécie pas au regard du projet d’ensemble mais du projet pour chaque secteur.
Partant, commet une erreur de droit, le juge qui prend en compte l’ensemble du projet d’urbanisation « aux seuls motifs que la modification du plan local d’urbanisme de la commune avait prévu l’aménagement d’une zone en plusieurs étapes et que le projet de lotissement contesté s’inscrivait dans le cadre de cet aménagement » (CE, 28 novembre 2018, Commune de la Turballe, n°419315, sera mentionné aux Tables).
- Pour être autorisée en zone agricole, une centrale photovoltaïque doit mettre en valeur les ressources naturelles mais aussi permettre l’exercice d’activités agricoles, pastorales ou forestières, que celles-ci s’exercent déjà ou pas, a estimé la Cour administrative d’appel de Marseille. Dans ces conditions, « il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, d’apprécier si le projet permet l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain d’implantation du projet, dont la nature doit être appréciée au regard des activités qui sont effectivement exercées dans le secteur concerné ou, le cas échéant, auraient vocation à s’y développer, en tenant compte notamment de la superficie de la parcelle, de l’emprise du projet, de la nature des sols et des usages locaux» (CAA Marseille, 11 décembre 2018, Société Centrale Solaire Orion 6, n°17MA04500).
- Par un arrêt du 18 décembre 2018, la Cour administrative d’appel de Bordeaux, a, après avoir rappelé que « le législateur a entendu notamment autoriser à titre exceptionnel dans les zones agricoles la délimitation de sous-secteurs en nombre et en superficie restreints dans lesquels des constructions sont autorisées, en vue de favoriser l’entretien du bâti ou la construction de bâtiments non strictement liés à l’activité agricole, dans l’intérêt de la vocation agricole des lieux environnants», précisé qu’il appartenait au juge administratif d’exercer un contrôle normal sur la création de Secteurs de Taille et de Capacité Limités (STECAL) (CAA Bordeaux, 18 décembre 2018, Commune de Lapeyrousse-Fossat, n°17BX00301).
Contentieux
- Le 22 octobre 2018, les juges du Palais Royal ont précisé le point du départ du délai du déféré préfectoral en cas de permis de construire tacite. Concrètement, en cas de permis tacite, la commune est réputée avoir satisfait à l’obligation de transmission si elle a transmis au préfet l’entier dossier de demande. Ce n’est donc qu’« à compter de la date à laquelle le permis est acquis ou, dans l’hypothèse où la commune ne satisfait à l’obligation de transmission que postérieurement à cette date, à compter de la date de cette transmission » que le délai du déféré court. Plus encore, en cas de demande de pièces complémentaires au pétitionnaire par la commune, « la transmission au préfet de l’entier dossier implique que la commune lui transmette les pièces complémentaires éventuellement reçues en réponse à cette invitation » (CE, 22 octobre 2018, M.B., n°400779, sera mentionné aux Tables).
- La jurisprudence Czabaj (CE, 13 juillet 2016, M. Czabaj, n°387763, sera publié au Recueil) a fait son entrée dans le contentieux de l’urbanisme.
Ainsi le Conseil d’État a-t-il étendu et précisé la solution retenue par son arrêt du 13 juillet 2016 aux recours en annulation formés contre une autorisation d’urbanisme affichée mais ne mentionnant pas les voies et délais de recours.
La Haute assemblée considère que
« le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment par les tiers un permis de construire, une décision de non-opposition à une déclaration préalable, un permis d’aménager ou un permis de démolir ; que, dans le cas où l’affichage du permis ou de la déclaration, par ailleurs conforme aux prescriptions de l’article R. 424-15 du code de l’urbanisme, n’a pas fait courir le délai de recours de deux mois prévu à l’article R. 600-2, faute de mentionner ce délai conformément à l’article A. 424-17, un recours contentieux doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans un délai raisonnable à compter du premier jour de la période continue de deux mois d’affichage sur le terrain ; qu’en règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable ; qu’il résulte en outre de l’article R. 600-3 du code de l’urbanisme qu’un recours présenté postérieurement à l’expiration du délai qu’il prévoit n’est pas recevable, alors même que le délai raisonnable mentionné ci-dessus n’aurait pas encore expiré » (CE, 9 novembre 2018, M. C. et autres, n°409872, sera mentionné aux Tables).
- C’est également le 9 novembre 2018 que la Cour administrative d’appel a, après avoir rappelé qu’« eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction», rejeté le recours du voisin immédiat formé à l’encontre d’un un permis de construire modificatif portant sur la modification des façades, du talutage, des aires de stationnement de la plateforme, sur la création d’un local technique et la construction d’un mur de soutènement. Pour ce faire, la Cour a relevé que le requérant « n’établit pas que le projet de M. E…, tel qu’il a été autorisé par l’arrêté du 28 mai 2015 attaqué, serait susceptible, eu égard à sa nature, à son importance et à sa localisation, en tant notamment qu’il prévoit la réalisation d’un talutage et d’un mur de soutènement en partie Nord-Est du terrain, d’affecter les conditions d’occupation et d’utilisation de son bien par la création d’une plateforme depuis laquelle M. E… disposerait d’une vue droite sur son terrain » (CAA Marseille, 9 novembre 2018, M.B.D., n°18MA04122).
- La circonstance que le permis de construire modificatif sollicité en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme intervienne au-delà du délai imparti par la juridiction ne fait pas obstacle à la régularisation du permis initial a jugé la Cour administrative d’appel de Bordeaux (CAA Bordeaux, 15 novembre 2018, M.D.C. et autres, n°16BX03080).